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Les data centers, du plutonium paré d’or ?

Depuis plus d’une décennie, les data centers constituent une classe d’actifs immobiliers très prisée par les investisseurs institutionnels. Elle offre à la fois une stabilité des flux locatifs et une croissance structurelle du secteur numérique ; cette pérennité n’est-elle aujourd’hui toutefois pas chahutée par les nouvelles exigences nées de l’évolution technologique de ce secteur ?

L’explosion récente de la demande

En effet, le développement fulgurant de l’intelligence artificielle, notamment de la GenAI, et la transformation numérique globale bouleversent l’industrie des data centers, portée par diverses initiatives gouvernementales (Stargate aux USA, InvestAI en UE) ; la demande d’infrastructures de très grande taille (hyperscale) explose, tirée par le cloud et les besoins croissants en High-Performance Computing : plus de 50 % des investissements des trois géants du cloud (AWS, Microsoft Azure et Google Cloud) ont ainsi été concentrés sur les actifs hyperscale en 2024.

Evolution et estimation de l’offre mondiale en data centers, Goldman Sachs Research

Les conséquences potentielles à prendre en compte

Cette dynamique entraîne naturellement certaines conséquences quasi-immédiates :

  • Consommation énergétique : d’ici 2026, la consommation électrique des data centers pourrait dépasser 1 000 TWh/an, soit deux fois la consommation annuelle de la France, générant des surcoûts d’électricité, de taxes carbone ou d’obligations de verdissement ;
  • Consommation d’eau : certains rapports spécialisés évoquent jusqu’à 1,8 milliard de m³/an de consommation directe mondiale, avec des conflits d’usage potentiels dans les régions en stress hydrique ;
  • Coûts de construction et maintenance : les évolutions technologiques (refroidissements direct-to-chip ou par immersion) peuvent réduire les dépenses d’énergie à long terme, mais génèrent des surcoûts immédiats, étant entendu que les coûts de construction du bâti représentent moins de 40% de l’enveloppe globale ;
  • Facteurs sociaux et réglementaires : les impacts environnementaux (mines, émissions, consommation d’eau, usage de terres rares) alimentent une défiance croissante, et les autorités renforcent leurs exigences : réglementation sur les émissions, autorisations d’urbanisme, normes environnementales, etc. Ces contraintes pèsent sur les délais de développement et peuvent réduire la liquidité de certains actifs.

Qu’en est-il des fonds d'immobilier ?

Pour l’immobilier d’investissement, cela se traduit de facto par rendre potentiellement obsolètes certains actifs, faute de performances énergétiques ou environnementales adaptées, ou tout du moins imposer d’importants capex : la mise à niveau technique (équipements, systèmes de refroidissement, efficacité énergétique) pourrait vite devenir une condition sine qua none du maintien de la valeur locative et éviter la décote desdits actifs. 

De plus, les conflits d’usage récemment médiatisés en Espagne, Uruguay, Arizona et même aux Pays-Bas, pourraient ternir l’image des data centers auprès des investisseurs institutionnels, toujours très soucieux de leur propre positionnement ESG.  

Mais cela se traduit aussi par l’émergence de nouveaux produits d’investissement comme les Powered Land par exemple, terrains aménagés assortis de garanties contractuelles de fourniture d’un certain volume énergétique. 

Les data centers constituent donc toujours une opportunité majeure pour l’immobilier d’investissement, avec un potentiel de rendement et de croissance indéniables. La maîtrise des risques ESG, la sélection rigoureuse des emplacements et l’anticipation des évolutions réglementaires seront déterminantes pour sécuriser la valeur des investissements dans ce segment en pleine expansion.

Sources : IEA 2024 Electricity Report, Goldman Sachs Report, Ember Yearly Electricity Data, Bloomberg analysis, S&P Global works.